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logo samedi 20 juin 2020
Bonjour, bienvenue dans votre rendez-vous hebdomadaire avec les débats de l’économie
Rupture économique, rupture idéologique

Le régime d’incertitude créé par la pandémie a brisé les normes, les savoirs et les habitudes. Face à cette situation, Etat, entreprises, manageurs et société civile ont mis en œuvre de nouvelles façons d’interagir.

« La science est balbutiante face aux enchevêtrements des vivants », constate la philosophe Isabelle Stengers, qui estime que la crise sanitaire a révélé l’incapacité du pouvoir politique et des « experts » à sortir de l’idéalisme de la croissance et à penser la réalité qui nous attend. Selon le sociologue Pascal Ughetto, « la crise sanitaire a imposé l’autorité des situations ». Les Français ont dû, loin de leurs habitudes, négocier et improviser les réponses à la crise sans devoir obéir à des prescriptions préétablies.

Tout cela conduit à « repenser l’armature de l’action publique pour en finir avec la panique et le déni », note le juriste Frédéric Allaire qui appelle à la construction démocratique et transparente d’un Etat-prévoyance convié à gérer des risques de plus en plus massifs. « Le management utilitariste n’est clairement pas soutenable », renchérit le consultant Ibrahima Fall, qui dénonce les comportements rivés sur le court terme.

« Penser que l’on peut substituer à l’ancien modèle un nouveau modèle conçu en chambre n’est pas réaliste », déplore de son côté le consultant Quentin Mermet. Il redoute que les discours sur « le monde d’après » oublient la réalité des rapports de force et la nécessité d’une négociation. « Pour devenir providence, l’entreprise doit lever l’opposition entre contraintes du marché et obligations de solidarité », soulignent d’ailleurs Hervé Chapron et Michel Monier, anciens dirigeants de l’Unédic et de Pôle emploi, qui doutent de la soudaine conversion des entreprises à « l’intérêt général » à la faveur de la crise pandémique

« L’affaiblissement du politique par les doctrines néolibérales a réduit l’Etat aux fonctions régaliennes », rappellent l’économiste Gilles Rotillon et le géographe Sylvain Rotillon. Or les relations complexes qu’entretiennent actuellement pouvoir politique et pouvoir économique dans l’ensemble des pays favorisent le second au détriment du premier. Mais « si l’action publique a besoin d’un encadrement, elle doit aussi libérer l’initiative des acteurs de terrain », défend le haut fonctionnaire Bernard Abate. Dans la gestion de la crise du Covid-19, l’absence de souplesse et de proximité de la bureaucratie, a entravé la prise de décisions utiles et rapides.

Chronique

Jean Pisani-Ferry : « La postérité du plan de relance européen sera une affaire d’exécution »

Jean Pisani-Ferry

professeur ­d’économie à Sciences Po, à la Hertie School de Berlin et ­à l’Institut ­universitaire européen ­de Florence

Chronique

« Serait-il excessif de demander aux détenteurs de patrimoine financier ou immobilier élevé d’en transférer 10 % de la propriété à la collectivité ? »

Pierre-Cyrille Hautcœur

Chronique

« Le commerce de rue pourrait servir de remède à l’augmentation du chômage »

Julien Bouissou

Chronique

« L’ère du pétrole low cost a commencé, un défi pour les compagnies multinationales »

Philippe Escande

Chronique

« Et si la crise accélérait la transition énergétique, et donc la fin rapide du pétrole ? »

Jean-Michel Bezat

Brigitte Dormont : « Il faut mettre sur la table la question d’un pilotage des dépenses de ville »

L’économiste montre comment l’inégalité de gestion financière entre médecine de ville et hôpital d’une part, et entre hôpitaux d’autre part, a mené le système de santé dans une impasse, dont il s’agit aujourd’hui de sortir.

Gaby Bonnand et Etienne Caniard : « La politique de santé ne doit pas se réduire à augmenter les moyens consacrés à l’hôpital »

S’il est normal qu’une crise conduise à privilégier l’urgence, il est impératif que la prévention cesse d’être le parent pauvre des politiques sanitaires, écrivent deux spécialistes des questions de santé.

Carine Milcent : « La saturation des hôpitaux a conduit à innover en matière d’articulation entre les fonctions sanitaire et médico-sociale »

L’économiste Carine Milcent souligne que, face à une gestion centralisée débordée, ce sont les initiatives locales qui ont organisé la gestion des patients et les interactions entre hôpitaux, médecine de ville et secteur privé.

Karl Eychenne : « Il se pourrait bien que la dette s’apprécie, mais ne se juge plus »

Le financier Karl Eychenne analyse ce que la politique de création monétaire actuelle change à notre perception des notions de créancier et de débiteur.

Jullien Brezun et Marion Darrieutort : « Face à la crise durable qui s’annonce, acceptons de payer nos salariés tous les quinze jours »

Les deux entrepreneurs proposent aux sociétés qui en ont la possibilité de faire un « geste simple » pour soutenir la consommation.

Aide à domicile : « Les caractéristiques de ces emplois font qu’ils ne sont pas à temps partiel mais plutôt payés à temps partiel »

Les deux économistes François-Xavier Devetter et Emmanuelle Puissant suggèrent au gouvernement, d’aller au-delà d’une prime exceptionnelle pour l’aide à domicile, mais aussi de repenser le décompte du temps de travail, ce qui conduirait à augmenter les revenus mensuels des aidants.

Pierre-Noël Giraud : « Comment vont s’organiser les télétravailleurs pour assurer la fonction sociale que jouait auparavant la cafétéria d’entreprise ? »

L’économiste imagine, dans une tribune au « Monde », un avenir du travail où, libérés de la contrainte physique de la présence en entreprise, les salariés s’ouvriraient à des rencontres extérieures à leur entreprise, et de ce fait plus créatives.