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Édition du vendredi 17 mars 2023
Politique
Bonsoir ! Chaque vendredi à 18 heures, la rédaction du « Monde » résume et décrypte dans votre boîte mail l’actualité politique de la semaine. Bonne lecture !

L’INFO DE LA SEMAINE


Le gouvernement déclenche un tollé avec le recours au 49.3

A la veille du second passage de la réforme des retraites à l’Assemblée, jeudi 16 mars, Emmanuel Macron a tranché, et la première ministre, Elisabeth Borne, s’y est résolue : elle utilisera l’article 49.3 pour faire adopter le texte sans vote. Après de multiples tractations dans la matinée avec les dirigeants de la majorité, le camp présidentiel a constaté qu’il n’avait pas la garantie de disposer d’une majorité suffisante pour cette réforme.

L’ambiance est électrique au Palais-Bourbon. Le discours d’Elisabeth Borne est écrasé par La Marseillaise chantée par les « insoumis » et le vacarme des élus du Rassemblement national. Les députés de la coalition présidentielle, comme ceux de la droite, restent interdits devant cette scène dantesque. Elisabeth Borne vise les 61 élus Les Républicains (LR) et « leurs échappées personnelles » – l’absence d’un soutien franc de la droite s’est révélée fatale pour le gouvernement –, tout en défendant « une réforme nécessaire ». « Je considère qu’en l’état les risques financiers, économiques sont trop grands », avait asséné un peu plus tôt Emmanuel Macron pendant le conseil des ministres extraordinaire.

Lire aussi : 49.3 pour les retraites : « honte », « scandale », « démission »… à l’Assemblée nationale, un Hémicycle révolté

La réaction de l’opposition est vive : « Aveu de faiblesse » ; « échec spectaculaire » ; « coup de force démocratique » ; « reddition en rase campagne » ; « crise de régime » En salle des Quatre-Colonnes, les membres de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale rivalisent de formules chocs. « Nous sommes dans un basculement autoritaire pour passer en force sur une réforme dont personne ne veut », éructe la cheffe de file des « insoumis », Mathilde Panot.

Lire aussi : Face au fiasco du 49.3, Emmanuel Macron laisse Elisabeth Borne en première ligne

« Je pense qu’il fallait aller au vote, car le peuple n’est pas avec nous, considère pour sa part le député de l’Hérault Patrick Vignal (Renaissance). Nous sommes en majorité relative, nous devons changer nos pratiques. Quand on fait une réforme où tous les syndicats sont contre nous, c’est qu’elle ne marche pas. »

Alors que l’intersyndicale a appelé à la mobilisation ce week-end et à une neuvième journée d’action nationale jeudi 23 mars, le groupe centriste Libertés, indépendants, outre-mer et territoires (LIOT) a déposé une motion de censure « transpartisane », vendredi, contre le gouvernement. Le Rassemblement national en a également déposé une.



L’IMAGE DE LA SEMAINE

BERTRAND GUAY / AFP

Dans cette rue du 2e arrondissement de Paris, vendredi 17 mars, les poubelles débordent. Près de 10 000 tonnes de déchets s’accumulent sur les trottoirs parisiens, en raison de la grève continue, depuis le 7 mars, des éboueurs de la capitale, qui protestent contre la réforme des retraites. La grève devrait se prolonger au moins jusqu’au 20 mars. L’affaire a rapidement pris une tournure politique, les oppositions accusant la maire, Anne Hidalgo, de soutenir le mouvement. Mardi 14 mars, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a donné instruction au préfet de police de Paris, Laurent Nunez, de demander à la mairie de « réquisitionner » des moyens pour débarrasser les rues. L’édile ayant annoncé le lendemain qu’elle ne donnerait pas suite à cette demande, le ministère de l’intérieur a fait savoir, jeudi, que le préfet de police avait réquisitionné « le service de propreté de la ville de Paris ». Mais les effets se font toujours attendre et les ordures continuent de s’amonceler sur les trottoirs.

Lire aussi : Grève des éboueurs : le préfet de police va réquisitionner des agents



LE CHIFFRE


100

C’est la centième fois que l’article 49.3 de la Constitution, qui permet de faire adopter un texte de loi sans vote de l’Assemblée nationale, est utilisé sous la Ve République. La première ministre, Elisabeth Borne, en a fait usage onze fois au total, après avoir engagé dix fois la responsabilité de son gouvernement pour faire adopter les budgets, à l’automne 2022. Avec vingt-huit utilisations, le premier ministre socialiste Michel Rocard (1988-1991) reste celui qui en a fait l’usage le plus intensif.

Lire aussi : Comment fonctionne l’article 49.3, utilisé pour la onzième fois par Elisabeth Borne ?

L’opposition a la possibilité de répliquer au recours à l’article 49.3 en déposant une motion de censure qui, si elle est votée, renverserait le gouvernement – ce que viennent de faire, vendredi, le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires (LIOT), avec une motion transpartisane, et le Rassemblement national. Cinquante-neuf procédures similaires ont été déposées dans le cadre d’un 49.3 depuis 1958, mais aucune n’a jamais abouti.



LA PHRASE

« J’assume d’être un fusible »

Elisabeth Borne lors d’une réunion avec Emmanuel Macron, jeudi 16 mars

A quelques heures de monter à la tribune de l’Assemblée nationale, jeudi 16 mars, la première ministre, Elisabeth Borne, accepte, lors d’une réunion avec le chef de l’Etat, et sous les regards d’une poignée de ministres et de chefs de groupe de la majorité, d’endosser la responsabilité d’un recours à l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter sans vote la réforme des retraites. Après un peu moins de six mois de bataille acharnée pour aller chercher les voix manquantes et obtenir une majorité sur son texte, l’hôte de Matignon se résigne à dégainer cette arme constitutionnelle.

En vidéo : Elisabeth Borne annonce un 49.3 sous les huées



LE DÉCRYPTAGE

La défiance envers la politique fait son retour en France après la parenthèse du Covid

Dans un pays déchiré par la réforme des retraites, le niveau de confiance des Français dans les institutions est au plus bas depuis la crise des « gilets jaunes », selon une enquête réalisée par l’institut OpinionWay pour le Cevipof dans quatre pays européens.

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LA SEMAINE POLITIQUE

Stéphane Layani, l’ami de l’ombre d’Emmanuel Macron à Rungis

Il est bien davantage que le patron du plus vaste marché de produits frais du monde : cet intime de vingt ans du président est aussi un efficace lobbyiste de la chasse et forme avec sa femme, présidente de l’Autorité des marchés financiers, un vrai couple de pouvoir.

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Au Medef, la bataille pour la succession de Geoffroy Roux de Bézieux est lancée

Deux candidats sont déjà déclarés dans l’optique de l’élection, qui aura lieu début juillet : le président délégué du mouvement, Patrick Martin, et l’une des vice-présidentes, Dominique Carlac’h.

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L’élan cassé du « féminisme » du couple Macron-Borne

Malgré des avancées, l’égalité femmes-hommes, érigée comme la « grande cause » du quinquennat, apparaît moins portée haut politiquement que sous le précédent mandat.

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Emmanuel Macron invite les élus locaux à mettre en place « une vraie décentralisation »

Le chef de l’Etat a reçu, lundi 13 mars à l’Elysée, les associations d’élus locaux, sans leur présenter beaucoup de pistes précises.

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Le nombre d’agressions d’élus marque une hausse

En un an, entre 2021 et 2022, les atteintes verbales ou physiques à l’encontre des élus locaux, notamment les maires et leurs adjoints, ont augmenté de 32 %, passant de 1 720 à 2 265, selon des chiffres rendus publics mercredi par le ministère des collectivités territoriales.

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L’AGENDA


Lundi 20 mars

Réforme des retraites. Examen probable des motions de censure déposées après l’utilisation de l’article 49.3 de la Constitution par la première ministre pour faire adopter sans vote le projet du gouvernement à l’Assemblée nationale.

Internet. Le gouvernement présente un plan visant à mieux réglementer le travail commercial des influenceurs et à protéger les consommateurs de leur contenu. Une consultation publique sur le sujet avait eu lieu en début d’année et plusieurs recommandations pourraient être reprises dans le plan annoncé par Bruno Le Maire, le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Mardi 21 mars

Corse. Premier anniversaire de la mort d’Yvan Colonna, tué le 21 mars 2022 après son agression mortelle subie par un codétenu radicalisé à la centrale d’Arles (Bouches-du-Rhône), le 2 mars 2022.

Rassemblement national. Le parti lepéniste lance son « école des cadres », préparée depuis l’été 2022 avec le sondeur Jérôme Sainte-Marie.

Jeudi 23 mars

Réforme des retraites. L’intersyndicale appelle à une nouvelle journée de mobilisation contre le projet du gouvernement.

Union européenne. Emmanuel Macron se rend au Conseil européen à Bruxelles.




DÉBATS ET IDÉES

Réforme des retraites : « Un gouvernement avisé doit se garder de mépriser la démocratie sociale »

La stratégie du gouvernement, qui oppose la légitimité des urnes à la rue dans le conflit social sur la réforme des retraites, est fallacieuse, prévient l’universitaire et juriste Alain Supiot, dans une tribune au « Monde ». L’action collective des travailleurs, constitutive d’une citoyenneté sociale, est complémentaire de la vie démocratique et lui est essentielle.

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L’AUTRE SUJET DE LA SEMAINE

Les déboires de Credit Suisse mettent les banques françaises et européennes sous pression

Dans le sillage de Credit Suisse, les cours des principales banques d’Europe ont rechuté mercredi, deux jours après le repli provoqué par la chute de l’américaine SVB.

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Sur la journée du mercredi 15 mars, l’indice européen Stoxx du secteur bancaire s’est replié de 8,4 % ; en une semaine, il a fondu de près de 17 %. ODD ANDERSEN, FABRICE COFFRINI, MIGUEL MEDINA, DOMINIQUE FAGET / AFP

Vendre d’abord, avant de faire le tri. Ce réflexe boursier typique en temps de crise a encore frappé les valeurs bancaires européennes, mercredi 15 mars, les déboires de Credit Suisse amplifiant la baisse amorcée le vendredi précédent avec la chute de la Silicon Valley Bank (SVB). A Paris, BNP Paribas et Société générale ont vu leur cotation brièvement suspendue en matinée, en application de mécanismes automatiques, et cédaient en clôture respectivement 10,1 % et 12,2 %, tandis que Crédit agricole SA perdait 5,2 %.

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